Jul 17, 2005

Le concept de consentement préalable donné librement et en connaissance de cause


Dans la salle de conférence, les flashes crépitent. Adelard Blackman, représentant spécial du Chef Louie Chanolquay de la Buffalo River Dene Nation, au Canada, tient dans sa main légèrement tremblante une plume d’aigle, symbole de sa Communauté, alors qu’il prononce sa déclaration. Autour, un groupe de participants à cette 23° Cession du Groupe de Travail sur les Populations Autochtones (GTPA) s’agite pour immortaliser ce moment il est vrai émouvant. En ce troisième jour de travail du GTPA, les débats continuent au Palais des Nations, à Genève.

Le concept de « consentement préalable donné librement et en connaissance de cause » fut l’un des principaux thèmes de la journée, à partir d’un document rédigé par Antaonella-Iulia Motoc, en collaboration avec la Fondation Tebtebba. Important pour des Populations autochtones souvent peu, voire pas du tout, impliquées dans les processus de décisions, ce sujet devient encore plus crucial quand il s’agit de décisions concernant des projets devant être réalisés sur les territoires originels de ces Populations, menaçant leurs ressources, mettant en péril leurs cultures, leurs liens avec la nature et leurs modes de vie traditionnels.

Un autre point central du travail fut consacré au projet de déclaration sur la protection des héritages des populations indigènes, thème principal du GTPA cette année. Yozo Yokota, expert du GTPA, et le Comité Saami avaient rédigé un document de travail, dans lequel ils demandaient notamment à l’ONU d’adopter au plus vite la déclaration sur les Droits des Peuples Autochtones, en vue de la « préservation du savoir et de l’Héritage culturel Autochtones ». Les débats furent intéressants, les délégués commentant le texte, le représentant du Comité Saami l’expliquant. On pouvait cependant regretter l’absence de Yozo Yokota lors de la cession. Il est encore trop tôt pour savoir si ces efforts de la part des Populations Autochtones seront récompensés par l’adoption du texte par les Commissions des Nations Unies auxquelles est rattaché le GTPA, tant cette adoption est attendue depuis de nombreuses années.

Intéressante, la déclaration de la représentante de la commission Européenne le fut également. Présente « avant tout pour écouter les problèmes et les propositions des représentants et des membres du GTPA, afin de les intégrer aux réflexions et aux discussions de la Commission », elle fut aussi à Genève pour exprimer l’intérêt de l’Union européenne (UE), à travers sa Commission, pour les questions liées aux Populations Autochtones et à leurs Droits Fondamentaux. La question des liens entre l’ONU, le GTPA et l’UE est à creuser, et il est possible de penser qu’une coopération plus poussée entre ces institutions serait profitable aux Populations Autochtones. Dans la même logique, peut-être peut-on même formuler le souhait de voir le Conseil de l’Europe, autre institution reconnue, prendre une plus large part aux Cessions du GTPA.

Notons également qu’une partie de la journée fut consacrée à la fin du débat abordé lors du 2° jour (le 19 Juillet), concernant les « Populations Autochtones et la prévention et la résolution des conflits ». C’est au cours de ces discussions que Mr. Blackman, évoqué plus haut, a présenté son analyse – pertinente – des conflits contemporains, dits « ethniques » ou « locaux », définitions qui selon lui cachent trop souvent la responsabilité des Etats Nations et de leurs « comportements colonialistes ». Et Mr. Blackman de citer le Rapporteur Spécial Mr. Stavonhaguen : « c’est la négation du droit à l’autodétermination qui créé les conflits ; pas le fait de réclamer ce droit ».

Ce fut une journée encore chargée d’enseignements, de débats, de propositions, mais aussi d’interrogations, de questions et de problématiques soulevées qui restent sans réponses. Cette troisième journée de la 23° Cession du GTPA, comme les deux précédentes, illustre ce que constitue le GTPA, la plus large rencontre de Populations Autochtones au sein des Nations Unies, en même temps qu’un organe encore loin de pouvoir apporter des réponses concrètes et entendues au plus haut niveau, aux problèmes qui se posent à toutes les Communautés Autochtones de la Planète.